Ãconomiste libano-britannique, présidente d’ONG, passée par le prestigieux programme Advanced Leadership Initiative dâHarvard, Haifa Al Kaylani revient pour JA Emploi & Formation sur sa conception du leadership.
Ãconomiste du développement, engagée dans lâaction sociale en faveur de la visibilité des femmes arabes dans les sphères économiques internationales, Haifa Fahoum-Al Kaylani a fondé le Forum arabe internationale des femmes en 2001 et côtoie depuis plus de trente ans la fine fleur des dirigeantes et dirigeants mondiaux. Siégeant au sein de plusieurs conseils dâadministration, elle a suivi pendant un an, en 2017, le prestigieux programme « Advanced Leadership Initiative » (ALI) dâHarvard. Jeune Afrique Emploi & Formation lâa rencontré à Genève, en marge du lancement de la célébration du centenaire de lâOrganisation internationale du Travail (OIT) à laquelle elle participe en tant que commissaire à la Commission mondiale sur le futur du travail.
Quâelle est votre définition du leadership ?
Haifa Al Kaylani : Elle est simple. Un leader est une personne qui a une vision et qui sait comment la mettre en Åuvre.
Comment le devient-on selon vous ?
Premièrement, lâéducation est extrêmement importante. Lâesprit doit être ouvert à lâapprentissage. Deuxièmement il faut interagir avec les autres. Vous ne pouvez pas devenir un leader si vous restez dans votre coin. Vous devez aller à la rencontre des gens, quâils fassent partie de votre communauté, de votre réseau professionnel, ou de votre universitéâ¦
VOUS ÃTES ARABES ? VOUS ÃTES MUSULMANE ? »
Comment le leadership sâapplique-t-il concrètement ?
Il faut dâabord identifier un besoin. Lorsque jâétais présidente de la Fédération internationale pour la femme, il mâest arrivé plusieurs fois dâêtre confrontée à des discours étonnés du type « Vous êtes arabes ? Vous êtes musulmane ? ». Pour moi câétait absurde, ça ne pouvait pas exister, surtout à Londres ! Je me suis rendu compte que dâautres femmes du Moyen-Orient ou dâAfrique du Nord (Mena) étaient aussi témoins de cela et je me suis dit quâil fallait créer une ONG afin de casser ce stéréotype et informer les gens en allant vers eux.
Jâavais fédéré un petit groupe. Mais il mâa rapidement fallu passer à une seconde phase qui est la coalition de partenaires. Dans mon cas, jâavais besoin de fonds, donc je me suis tournée vers le secteur privé et suis allé chercher des partenaires qui partageaient la même vision. Jâai rencontré les gouvernements et les ministres pour que ces derniers soient là pour entendre ce quâil y avait dans nos rapports et nos recommandations. Jâai également sollicité la société civile, les étudiants et les universitaires afin que les jeunes femmes aient des modèles à suivre. Enfin jâai parlé aux médias parce quâune cause doit être relayée.
A-t-on besoin dâavoir un puissant carnet dâadresses pour devenir un leader ?
Non. Vous avez besoin de toutes les parties prenantes nécessaires à votre projet. Et celles-là , vous allez les chercher, que vous les connaissiez ou non.
Vous fréquentez tous les jours des haut-dirigeants et des leaders politiques. Avez-vous noté des points communs chez eux ?
Oui. Ils sont mués par le désir de faire la différence et mettre un agenda en application.
LA RÃGION MENA EST ENCORE CELLE Oà LE TAUX DE FEMME SUR LE MARCHà DU TRAVAIL EST LE PLUS FAIBLE, MALGRà TOUT LâARGENT DÃPENSà DANS LâÃDUCATION. »
Comment rendre les femmes plus visibles dans les postes de direction ?
La question du plafond de verre nâest pas propre au Moyen-Orient et à lâAfrique du Nord, elle est dâordre mondiale. On voit que les femmes réussissent dans le secteur privé mais nâatteignent pas forcément des postes de dirigeantes. Les gouvernements se sont sérieusement emparés de la question. Certains ont appliqué des quotas, notamment dans les démocraties dâEurope du Nord. Au Royaume-Uni, il nây a pas de quotas mais dâimportantes incitations établies par le gouvernement et supportées par la ville de Londres. Ils utilisent la technique du « name and shame » qui vise à stigmatiser les entreprises qui ne vont pas dans ce sens.
Dans les régions arabes, nous voudrions commencer déjà par avoir plus de femmes sur le marché du travail. Nous sommes encore la région où le taux de femmes sur le marché du travail est le plus faible, malgré tout lâargent dépensé dans lâéducation et toutes les opportunités permises par les nouvelles technologies dâinformation et de communication.
NOUS AVONS BESOIN DE CRÃCHES DANS LES BUREAUX ET DE PLUS DE SUPPORT DANS LâÃGALITà DES SALAIRES AINSI QUE DANS LA LUTTE CONTRE LE HARCÃLEMENT. »
Au-delà de ce constat, comment y parvenir ?
La dynamique doit fonctionner dans les deux sens : du bas vers le haut et du haut vers le bas. Nous avons besoin que les gouvernements adoptent des lois qui permettent aux femmes de mieux concilier vie professionnelle et vie privée. Nous avons besoin de crèches dans les bureaux et de plus de support dans lâégalité des salaires ainsi que dans la lutte contre le harcèlement. Il faut assurer un environnement sain au travail. Enfin, les femmes doivent sâaider entre elles, elles doivent se dépasser, avoir confiance et ne pas être effrayées ou réservées. Trop souvent, même si la promotion est légitime et quâelles sont qualifiées pour, les femmes sont convaincues quâun autre va prendre leur place.
à LA MAISON, LâÃDUCATION ÃTAIT LA RÃGLE NUMÃRO UN. »
Au cours de votre carrière, avez-vous connu des situations de harcèlement ?
On me demande souvent, en tant que femme arabe et musulmane défendant la cause de mes semblables dans le milieu des affaires, si je suis victime de harcèlement ou de discrimination professionnelle. Mais je ne lâai jamais été parce que je viens de cette région, que je comprends la langue et les religions. Jâexplique aux hommes de ma région que je ne cherche pas à prendre leur place mais que je constate les mêmes problèmes quâeux et que, comme eux, je cherche des alliés pour atteindre ces objectifs communs : bâtir nos nations et développer nos entreprises.
Nombre de leaders disent avoir eu des mentors. Quels sont les vôtres ?
Je dois beaucoup à mes parents qui nous ont traité, mes quatre sÅurs et moi, comme sâils avaient eu cinq garçons. à la maison, lâéducation était la règle numéro un. La deuxième règle, câétait quâaucune dâentre nous nâétait autorisée à se marier ou même se fiancer avant dâavoir fini ses études. Lâobjectif était de de décrocher au minimum un Bac+3 mais le mieux câétait dâaller jusquâau master. Et puis il y a mon mari. Nous nous aidions mutuellement dans notre travail et il mâa toujours encouragé à intégrer des conseils dâadministration et à voyager pour le travail.
Quel futur est le futur du leadership selon vous ?
Je le vois dans la notion dâengagement. Un leader est défini comme tel parce quâil a bâti quelque chose. Pour cela, il faut dâabord être engagé.





















![[TERRAIN EN VENTE] Lieu : Camayenne](https://www.lesannonces.net/wp-content/uploads/2019/10/TERRAIN-218x150.jpg)
![[APPARTEMENT Ã LOUER] Lieu : Lambanyi](https://www.lesannonces.net/wp-content/uploads/2019/10/APP-218x150.jpg)



