Comme un pari sur l’avenir et malgré un marché encore restreint, des écoles de cinéma telles que l’Esav au Maroc ou l’Esac en Tunisie proposent depuis 2018 un programme spécialement consacré à la conception de séries télévisées.
Depuis une vingtaine dâanneÌes, la production de seÌries TV est en pleine expansion, égalisant certaines productions cinématographiques en termes dâambition et de qualité. Le succeÌs global des seÌries ameÌricaines a deÌmontreÌ le potentiel du secteur au niveau eÌconomique, de la création de lâemploi et de lâexportation internationale. Un nouveau marché dans lequel le Maghreb souhaite sâimposer. Toutefois, lâoffre de formation sâadressant notamment au métier de lâécriture et création des séries TV y est encore aujourdâhui presque absente.
Câest pourquoi la Copeam (Conférence permanente de lâaudiovisuel méditerranéen) a lancé le projet Erasmus+ Fiest (Formation internationale pour lâécriture de séries télévisées), la première formation internationale aÌ lâeÌcriture de seÌries télévisées délivrée au Maghreb. Ce partenariat euro-méditerranéen, dont la formation pilote vient de se terminer, réunit cinq écoles de cinéma et de lâaudiovisuel qui ont choisi dâajouter cette formation à leur offre pédagogique : Alba (Liban), Esav (Maroc), Insas (Belgique), Ensav Toulouse (France) et Esac (Tunisie).
Une formation inédite
Pour être sélectionnés, les élèves doivent être titulaires au minimum dâun diplôme de premier cycle ou justifier dâun minimum de quatre années dâexpériences professionnelles.
De novembre à mai 2018, les cohortes pionnières ont pu accéder à une formation gratuite. « Les étudiants ont dâabord travaillé sur la structure dâun récit narratif de série, puis sur le processus dâécriture de la bible et enfin sur la rédaction du pilote du premier épisode de leur projet », explique Vincent Melilli, directeur de lâEsav à Marrakech.
Ici on doit penser lâhistoire différemment, imaginer une crise qui ne finit pas pour quâelle puisse se découper en épisodes puis en saisons ».
La formation théorique, accessible via une plateforme de e-learning est accompagnée dâateliers pratiques. « Chaque école a fait un travail local dâinterview avec des réalisateurs et producteurs pour avoir une approche du dispositif économique, de la fabrication et de lâécriture dâune série en fonction des spécificités du pays », affirme Lassad Jamoussi, directeur de lâESAC à Tunis.
Les élèves des différentes écoles partenaires, formés en groupes, ont proposé huit projets finaux dont deux émanant de lâEnsav et un de lâEsac. Oussama, diplômé dâun master réalisation à lâEnsav, a écrit le scénario de « The eyes that see it all », un thriller policier et métaphysique. « Jâavais plutôt lâhabitude dâécrire des courts métrages. Cette formation a été vraiment bénéfique, elle mâa permis de comprendre que lâécriture des séries nâa rien à voir avec les autres formes de fiction. Ici on doit penser lâhistoire différemment, imaginer une crise qui ne finit pas pour quâelle puisse se découper en épisodes puis en saisons ».
Pour lâinstant, comme ses camarades marocains et tunisiens, Oussama nâa pas encore réussi à vendre son projet. « Au Maroc, la télévision nationale ne pourrait pas diffuser notre série. Les plans imaginés ainsi que les dialogues sont trop osés. Les plateformes internationales quant à elles, auraient un problème avec la spécificité marocaine qui caractérise notre projet. On va retravailler le script pour trouver un équilibre entre les deux », explique le jeune diplômé.
Un marché et des usages en pleine mutation
Dans les pays arabes, la production nationale des seÌries teÌleÌvisuelles est consacreÌe presque exclusivement aÌ la peÌriode du mois de ramadan. Mais en Tunisie, certaines chaines privées sâemparent de ce nouveau marché et des producteurs se spécialisent, concurrençant les habituelles séries turques doublées en tunisien.
Même si tout le monde regarde des séries américaines, de plus en plus de spectateurs ont envie de découvrir dâautres cultures, dâautres points de vue. »
Le pari reste néanmoins risqué : « Les calculs que lâont fait sur ce marché occasionnel et précaire ne sont pas parfaitement stables. Cette année par exemple, on a observé que sur les propositions de contrat pour la production de nouvelles séries, les producteurs essayent tous de faire des économies sur les dépenses indispensables et courantes », regrette Lassad Jamoussi.
Ces dernières années le marché des séries a surtout été bousculé pas les plateformes de streaming comme Netflix ou Amazon prime. En produisant et achetant elles-mêmes des séries, elles sont devenues des acteur incontournable du secteur. « La nouvelle stratégie de Netflix est de produire des séries mélangeant normes internationales et spécificité locales. Cela leur permet dâêtre au plus près des attentes des consommateurs locaux », explique Hélène Laurichesse, responsable du parcours production du master création audiovisuelle à lâEnsav de Toulouse.
Lâengouement pour des fictions aux spécificités locales sâobserve également auprès du public : « Même si tout le monde regarde des séries américaines, de plus en plus de spectateurs ont envie de découvrir dâautres cultures, dâautres points de vue. Câest une vraie tendance sur laquelle les pays du sud de la Méditerranée doivent surfer », ajoute Hélène Laurichesse.
Câest le pari quâa fait Vincent Melilli en intégrant son école au programme Erasmus+ Fiest : « Lorsque lâécole a ouvert en 2006, jâai hésité à ouvrir une filière scénario mais je ne voyais pas de débouchés professionnels. Or, depuis, les séries se sont développées de manière importante. Bien quâil nây ait pas de chaines privées au Maroc, dâautres canaux se sont développés sur internet et via les plateformes de diffusion. Câest une ouverture très importante », explique le directeur de lâEsav Marrakech, avant dâajouter : « Des jeunes producteurs marocains viennent dâailleurs tout juste de signer avec Netflix ».
Viser le marché arabe ?
Si ce nouveau marché est attrayant, il nâest cependant pas toujours très accessible aux jeunes diplômés. « Sur ces nouvelles plateformes, une série doit avoir une qualité internationale en termes dâécriture, de personnage, dâimages et de prise de sons. Si on veut y arriver et réussir à sâexporter, il faut former des étudiants capables de répondre à cette demande. Ãa demande beaucoup de temps et de capacité humaine et logistique. Ce que nous nâavons pas toujours », analyse Rosy Raggi, directrice du département télévision de lâAlba à Beyrouth et partenaire du programme Erasmus+ Fiest.
Selon Lassad Jamoussi, le marché tunisien nâest lui aussi insuffisamment équipé pour permettre un développement pérenne de cette activité à lâéchelle internationale. Câest pourquoi, selon le directeur de lâEsac à Tunis, il faut viser le marché maghrébin et arabe dont les thématiques sont proches : « Les douleurs, les vécus et les perspectives sont les mêmes ! », observe-t-il.
La seule barrière ? Les dialectes locaux. « Pour pallier ce problème, nous voulons enseigner à nos élèves le potentiel du doublage à  la manière des productions turques qui sont doublées en syrien, un dialecte compris par presque tous les arabes. Il faut le prendre en compte dès la prise de son pour permettre des ventes sur des chaines comme la saoudienne MBC par exemple. Ce sont ces pistes que les futurs producteurs doivent développer pour importer les contenus tunisiens à lâinternational ».





















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